Le projet HU2F (l’Humain dans l’Usine Ultra Flexible) vise à caractériser et approfondir les connaissances des enjeux humains relatifs aux propositions industrielles autour d’usines « ultra flexibles ». Le groupe Michelin porte cette perspective et souhaite mener des études prospectives à propos des conséquences de cette flexibilisation importante de la production pour le travail humain La flexibilité visée suppose un haut niveau d’automatisation et donc une recomposition importante des pratiques professionnelles qui resteront présentes dans cet environnement. Dans le cadre de cette future organisation, il est pressenti que le rôle des opérateurs deviendra de moins en moins celui de réaliser des opérations de production, souvent répétitives, mais s’orientera vers un rôle de régulateur, coordonnateur voire de surveillance de l’activité du système flexible de machines de production.
Dans un premier volet, notre objectif est de capitaliser sur les informations que nous avons rassemblées pour proposer un certain nombre de scenarii probables qui refléteraient l’organisation humaine dans la future usine ultra flexible. Ces scenarii visent à simuler les futures situations de travail, afin de faire émerger « ce qui est nécessaire à un opérateur ou à un collectif d'opérateurs pour une action de travail » (Maline, 1994). Ces scenarii constitueront des configurations typiques, articulant Organisation-Compétences-Tâches, élaborées à partir des résultats du projet HU2F : ils évacueront les éléments et configurations repérées comme défavorables pour l’Humain, et favoriseront l’association de conditions et configurations repérées favorables. La revue de littérature effectuée ainsi que les cas de forte automatisation étudiées préalablement constituent la matière première : plusieurs sites Michelin, Schneider, Décathlon. D’autres sites pourront éventuellement compléter ce panel initial. Ces scenarii seront évalués et enrichis par des groupes de travail composés de différents acteurs comme des opérateurs, des concepteurs, des ergonomes, etc. Nos objectifs seront alors d’interroger différentes hypothèses de conception du point de vue du travail des futurs opérateur ; de faire émerger les besoins, à savoir «ce qui est nécessaire à un opérateur ou à un collectif d'opérateurs pour une action de travail» (Maline, 1994) ; ainsi que d’anticiper de futures marges de manœuvres qui permettront un travail plus autonome et plus adapté aux usages.
Dans un second volet, ces scenarii, seront enrichi par une approche issue de la psychologie sociale et en particulier de l’importance des valeurs dans les situations de travail hautement automatisées. En effet, une étude récente menée par Langstedt (2021), apporte un éclairage essentiel sur l’impact des technologies sur l’adéquation entre les valeurs personnelles des travailleurs et les exigences de leur poste (work-values fit). Langstedt (2021) a étudié les valeurs professionnelles (basées sur le modèle de Schwartz, 2006) de plus de 32 000 employés européens à travers 126 professions, en évaluant leur susceptibilité à l’automatisation. Les résultats révèlent que les professions hautement automatisables privilégient des valeurs comme la sécurité, la conformité, la tradition et le pouvoir, en contradiction avec les valeurs humanocentrés affichées par l’industrie 5.0. Néanmoins, comme le soulignent Fischer et Schwartz (2011), les valeurs sont davantage liées aux individus qu’aux groupes (ici les professions). Afin de pallier cette limitation, ce second volet comportera une étude visant à mesurer les valeurs d’opérateurs via des questionnaires standardisés. Ces mesures seront effectuées avant et après la présentation des scenarii de la future usine, en mettant l’accent sur le technocentrisme ou l’humanocentrisme. Cette étude empirique offrira donc une évaluation directe de l’adéquation entre les valeurs personnelles des opérateurs et les pratiques industrielles, et une première approche de l’acceptabilité des scenarii constitués.
Pour ce post-doctorat, il s’agira :
- de poursuivre la veille scientifique sur les travaux scientifiques (en ergonomie et psychologie) sur les questions ci-dessous et les expériences industrielles déjà existantes,
- d’animer une réflexion collective mobilisant différents acteurs de Michelin pour identifier et anticiper la nature des futurs systèmes techniques et composantes de l’usine ultraflexible ;
- de mesurer les enjeux relatifs aux valeurs d’opérateurs via des questionnaires standardisés. Ces mesures seront effectuées avant et après la présentation des scenarii de la future usine.
Activités
Les tâches principales du-de la-candidat-e seront
1) de mener une veille scientifique sur les projets similaires (en ergonomie et/ou en psychologie) au niveau national et international
2) de rendre compte de la littérature scientifique sur le sujet
3) de mener des expérimentations
4) d’analyser les résultats issus des différentes méthodologies employées
5) de valoriser le projet à travers des publications scientifiques visant des revues internationales
6) de communiquer avec différents interlocuteurs.
Compétences
Le-la candidat-e devra:
- être titulaire d’un doctorat en ergonomie ou en psychologie
- parler couramment français et avoir une bonne maitrise de l’anglais.
Une expérience ou une connaissance du milieu industriel est un plus.
Contexte de travail
Ce projet s'intègre dans FactoLab, laboratoire commun mettant en oeuvre un programme de recherche et développement à moyen et long terme sur la coopération homme-machine. L’objectif est de développer des robots collaboratifs et des dispositifs connectés au service des opérateurs de production, afin d’éliminer une partie des tâches physiquement pénibles ou génératrices de stress et d’améliorer, ainsi, le confort de travail.
Ce projet s'intègre dans FactoLab, laboratoire commun mettant en oeuvre un programme de recherche et développement à moyen et long terme sur la coopération homme-machine. L’objectif est de développer des robots collaboratifs et des dispositifs connectés au service des opérateurs de production, afin d’éliminer une partie des tâches physiquement pénibles ou génératrices de stress et d’améliorer, ainsi, le confort de travail.